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lundi 24 septembre 2018

Le bon beurre.

Le bon beurre.

Le curé de Saint-Pétasson, en Sologne, s'assit dans sa cuisine, en face d'une tasse de chocolat fumant et parfumé.
Sa cuisinière venait de prendre livraison d'une belle motte de beurre bien frais, fleurant bon la noisette, et l'avait placé avec une feuille de vigne dans un beurrier bien blanc, tout près de la tasse de chocolat, et tandis qu'elle déposait sur le coin de la table le prix de la motte de beurre, d'une douzaine d’œufs et d'un poulet bien gras, le curé beurrait silencieusement une large tranche de pain et félicitait la petite Mélie, la fille du fermier de l'Ormerond, de la bonne qualité des produits qu'elle lui apportait toutes les semaines.
Tout en mordant à belles dents dans sa tartine beurrée, bien imbibée de chocolat, le curé disait:
- Ma fille, ton beurre est tout simplement exquis! mais ce qui est vraiment admirable, ce sont les jolis dessins qu'on y voit dessus. C'est ratissé de main de maître. On dirait les allées du château de la Morinière.
Et comme la petite Mélie, toute fière, se rengorgeait, le curé reprit:
- Est-ce toi, par hasard, qui fais ces jolis dessins-là?
- Ben, m'sieu l'curé, d'aucunes foés c'est moé, d'aucunes foés c'est maman.
- Ah! Eh bien, dis-moi, ce n'est certainement pas avec un couteau, mais avec quoi donc faites-vous ce joli travail?
- Ah! c'est pas ben malaisé, allez, m'sieu l'curé, j'faisions ça avec nout'peigne...

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 13 mai 1906.

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