Un faux alcoolique.

Un faux alcoolique.
       Brizeux.

Ne taxez pas un homme d'alcoolisme avant de connaître les dessous de sa vie.

C'est ainsi que le doux poète Brizeux, l'auteur de Marie et des Bretons, dont la ville de Lorient célèbre  le centenaire le 12 septembre de cette année, fut injustement accusé d'avoir partagé le goût d'un trop grand nombre de ses compatriotes pour le vin ardent (nom celtique de l'eau-de-vie.)

Brizeux se présenta un jour à l'Académie française. Il eut pour lui Victor Hugo, et le grand poète fit campagne en sa faveur. Montalembert, dont le suffrage pesait beaucoup dans la balance, se montrait un peu hostile. "Mais enfin, lui-dit Victor Hugo, qu'avez-vous contre mon protégé? Trouvez-vous qu'il manque de talent? - Non, certes, répondit l'historien, mais il est un peu bohème. Figurez-vous que, quand il m'a rendu visite à quatre heures de l'après-midi, il sentait l'eau-de-vie.- Le poète expliqua que le pauvre Brizeux faisant un seul repas dans la journée, additionnait son café du classique gloria."

Brizeux ne fut pas de l'Académie. On prétend que Montalembert avait ajouté entre ses dents: "Nous avons assez d'un ivrogne... " et il désignait le rival de Victor Hugo lui-même: Musset.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 13 septembre 1903.