vendredi 30 décembre 2016

La plus grande gare du monde.

La plus grande gare du monde.


On vient de terminer, à New-York, la Nouvelle Gare Centrale, la plus vaste du monde entier.
Pendant dix ans, toute une armée d'ouvriers a travaillé sans relâche à l'édification de ce monument colossal et grandiose occupant une superficie de trente et un hectares et ayant coûté la somme fabuleuse de 900 millions.
Toutefois, le "Grand Central Terminal" ne s'élève pas en hauteur comme ces "sky-scrapers" (gratte-ciel) au nombre exorbitant d'étages qui, comme le dernier en date le "Woolworth-Building" avec 55 étages, peuvent donner asile à la population de toute une cité. D'ailleurs, on ne voit pas bien comment les trains auraient pu partir, par exemple, du quarantième au-dessus de l'entresol.
Le nouveau terminus n'a donc que deux étages. L'un de ces étages se trouve au niveau de la chaussée: c'est le second. L'autre est résolument souterrain.
Les deux étages sont sillonnés de soixante-huit voies, rigoureusement parallèles, comprenant cinquante-trois kilomètres de rails et desservant la circulation de plus de mille trains par jour. Ces voies sont réparties de la façon suivante: 42 au second étage réservé aux trains des grandes lignes, 26 au premier, réservées aux lignes de banlieue.
Cet immense entrelacs de voies, pour la création duquel il a fallu enlever 3.000.000 de mètres cubes de terre et 2.000.000 de mètres cubes de rochers, est sous la sauvegarde d'une cabine centrale de signaux et aiguilles à laquelle incombe la lourde responsabilité de diriger les mouvements affolants des convois qui, se succédant sans cesse, déversent sur les différents quais, plus de 100.000 voyageurs par jour.
Haute de quatre étages, cette cabine, véritable merveille d'ingéniosité mécanique, contient deux postes comprenant respectivement 420 et 362 leviers. Tous ces leviers sont actionnés électriquement et leur maniement est si aisé qu'un même aiguilleur peut facilement et sans peine en commander une quarantaine.
Malgré ses impressionnantes dimensions, le "Grand Central Terminal" ne manque pas d'un certain cachet de beauté, surtout dans sa façade principale dominant les imposantes constructions dont il est composé. La partie centrale de cette façade, affectant un arc de triomphe aux proportions monumentales, est d'un style mi-dorique, mi-Renaissance, dont la sévérité est adoucie par une ornementation à la fois sobre et élégante.




Si nous passons à l'intérieur, nous constatons que le génie pratique des Américains a su réunir dans la nouvelle station toutes les ressources du confort moderne. Ce prodigieux édifice participe du musée, du théâtre, du music-hall, de la banque, de l'hôpital et du magasin.
On y trouve des lavatories, des salons de conversation, des salles de bain, de douches, de repas, de lecture, de correspondance. Et lorsque le "Biltmore Hôtel", futur gratte-ciel de vingt-deux étages, actuellement en construction, sera achevé, le voyageur pourra, sans sortir de la gare se trouver, en quelques instants, dans sa chambre pour se mettre à l'aise et se reposer.
Mais le "clou" de la station, c'est le hall central, long de 90 mètres sur 36 de large et 36 de haut, au parquet et aux murs du plus beau marbre blanc. Grâce à son plafond, ce hall est devenu une des attractions de la ville de New-York, et il le mérite, certes.
En effet, sur un champ bleu turquoise, ce plafond, représente une zone de la sphère céleste, telle qu'on la voit d'Octobre à Mars. Il est traversé, de l'est à l'ouest, par deux larges bandes d'or figurant l'écliptique et l'équateur. Toutes les figures et signes s'étendent sur un segment de cercle allant d'un bout à l'autre du plafond. Ils occupent sur ce segment, les uns par rapport aux autres et par rapport à l'écliptique et à l'équateur, exactement les mêmes places que dans le ciel.
Les contours des constellations et des signes sont marqués en or et les 2.500 étoiles qui les composent sont éclairés, la nuit, par l'électricité, produisant ainsi un effet vraiment féerique.
Inutile de dire que les architectes ont pris toutes les dispositions possibles pour ménager le temps du public.
Dans cet ordre d'idées, nous devons signaler, principalement, une innovation des plus heureuses: la suppression des escaliers. Ils sont remplacés par des rampes tellement douces que l'on arrive au second étage, pour ainsi dire, sans s'en apercevoir.
Le départ et l'arrivée des trains sont annoncés par des signaux électriques lumineux placés dans les diverses salles d'attente.
Tous les trains "bouclent" la gare, ce qui facilite singulièrement le débarquement et l'embarquement des voyageurs et permet d'éviter les encombrements sur les quais.
Les bagages disparaissent comme par enchantement. On a construit, sous le réseau de la banlieue, un chemin de fer tubulaire circulaire, auprès duquel des ascenseurs amènent tous les colis. Là, ces derniers sont poussés sur de petites voies électriques, à travers le tube circulaire, jusqu'au quai voulu, où d'autres ascenseurs les transportent au train des grandes lignes dans lequel le voyageur désire s'embarquer.
Enfin, dernier détail. Le "Central Terminal" jouit d'une situation unique.
Il est en communication directe avec le moyen de transport le plus important de New-York, le Métropolitain qui traverse la ville d'un bout à l'autre, en se prolongeant sous le East River jusqu'à Brooklyn. Un million de personnes passent journellement sur cette immense artère souterraine dont tous les trains s'arrêtent dans la Gare Centrale. Et nous ne parlons pas des nombreux chemins de fer aériens qui, rayonnant dans toutes les directions, y passent tous sans exceptions.
Nous ne vous étonnerons pas en vous disant que les Yankees sont particulièrement fiers de leur "Central Terminal" et ils ont entièrement raison de l'être, car ils ont su créer, en l'élevant, la vraie gare modèle, le chef-d'oeuvre du genre.

                                                                                                                               L. Kuentz.

Le Magasin pittoresque, 15 juillet 1913.

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