dimanche 12 avril 2015

Chronique du Journal du Dimanche.

Chronique.

Dans la rigoureuse saison qui augmente toutes les misères, on a besoin aussi de toutes les ressources de la charité. C'est ordinairement des femmes que viennent le plus grand nombre de bienfaits, et on a remarqué cette année que le luxe effréné de toilettes, en remplissant largement le comptoir des marchands, diminue en même proportion la bourse de l'aumône. Aussi vient-il de se fonder dans une de nos paroisses, une association, dite de la Décence, qui a pour but de lever une croisade contre les ornements superflus et de battre en brèche les montagnes de soieries et de dentelles que les femmes promènent après elles.
Puisse cette sainte congrégation ne pas prêcher dans le désert! Ce sont en tous lieux les mêmes extravagances de vanité. Nous apprenons, par un journal anglais, que la Grande-Bretagne se trouve maintenant dans un embarras extrême. Tandis que la guerre des Indes lui met un million de révoltés sur les bras, il arrive tous les jours à Londres des victimes de ces désastres qu'il faut secourir. Eh bien! lorsque dernièrement le navire l'Indus a débarqué un nombre infini de femmes et d'enfants sans vêtements ni pain, il paraît que les belles ladies avaient tellement vidé leurs coffres, et partant ceux de leurs maris, chez les marchands de joyaux et cachemires, qu'il ne leur est plus resté à offrir à ces infortunés... que des larmes!

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A Madrid, voici un fait des plus étranges! Un évêque célébrait l'office divin dans l'une des principales églises. Un ancien soldat reconnut en lui un de ses camarades d'autrefois, et fut fort étonné de voir paré des habits pontificaux celui qui passait au régiment pour le plus mauvais garnement.
Il s'adressa à l'autorité dont l'attention fut éveillée, et qui, après vérification faite, envoya l'évêque en prison.
En effet, Jean-Joseph Pereira, ancien militaire déserteur, se réfugia en Portugal, où il se fit passer pour un aumônier de régiment. On l'accueillit avec bienveillance et on lui donna une cure sur la frontière. Là il administra tous les sacrements, et se fit remarquer par ses sermons si éloquents, d'un ordre si élevé, que l'évêque de Lisbonne le fit appeler dans la capitale, où sa réputation augmenta. Bientôt nommé évêque, il vint à Madrid, où il prêcha, à la grande admiration des fidèles, et fut chargé des sermons des principales fêtes.
Tout allait admirablement bien, jusqu'au moment où ce malencontreux camarade est venu le reconnaître et le dénoncer.
Il a été condamné à dix-huit ans de travaux forcés.
Maintenant, grand embarras! En Espagne, la loi civile n'existe pas: la loi religieuse forme seule l'état civil. Donc, il s'agit de savoir si la foule d'enfants baptisés par l'évêque Pereira sont chrétiens ou non, et, chose bien plus épineuse, si les époux qu'il a unis sont mariés ou ne le sont pas.

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Un événement épouvantable a eu lieu à la Ciota, au quartier Saint-Jean.
Le nommé Gerdre, maçon du chemin de fer, marié depuis peu d'années à une jeune femme qu'il adorait, et père d'un petit enfant au berceau, partait tous les matins, à quatre heures et demie, pour se rendre à son travail, laissant sa femme couchée.
Un de ces jours derniers, ne voyant point arriver sa femme qui lui apportait ordinairement son déjeuner, il s'en inquiéta, et revint chez lui pour connaître la cause de cette absence.
Il vit un spectacle horrible. Sa jeune femme, âgée de vingt-quatre ans, avait reçu trois coups de couteau pendant qu'elle allaitait son enfant, et était étendue morte dans une mare de sang. Le pauvre nourrisson avait été égorgé comme un agneau. Une nièce de la jeune femme avait aussi été frappée d'un coup de couteau, qui lui traversait encore le cou.
Dans la chambre, tout était dévasté et volé; une malle, contenant de l'argent, qui appartenait à différents ouvriers, avait été renversée, et on s'était emparé de 1.400 francs qui s'y trouvaient.
Heureusement, les féroces meurtriers se sont signalés eux-mêmes par trop de prudence. Après le triple meurtre commis, ils sont allés se faire couper la barbe chez un perruquier, dont les soupçons ont été éveillés par cette fantaisie que trois hommes auraient prise de se faire en même temps couper la barbe, et qui a averti la police.
Les malfaiteurs ont été amenés à Marseille, où leur procès s'instruit.

                                                                                                                       Paul de Couder.

Journal du Dimanche, 20 décembre 1857.

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