dimanche 29 mars 2015

Cathédrale Saint-Pierre de Troyes.

Cathédrale Saint-Pierre de Troyes
 (département de l'Aube).


La cathédrale de Troyes, si remarquable par son étendue, la beauté de sa décoration architecturale et la richesse de ses vitraux, n'était, au troisième siècle,  qu'une chapelle placée sous l'invocation du Sauveur. Une église plus vaste remplaça ce premier temple au quatrième siècle et fit elle-même place à un autre monument élevé en 870 par l'évêque Othulphe, ruiné par les Normands en 898, et reconstruit par l'évêque Milon en 980.
Le terrible incendie de 1198, qui consuma une grande partie de la ville, atteignit aussi la cathédrale, alors couverte en plomb. Ce désastre ruina les habitants, et ce ne fut que vingt ans après que l'évêque Hervée commença à jeter les fondements du nouvel édifice qu'il voulut rendre magnifique; mais la mort arrêta ses projets. 
En 1223, le sanctuaire et les chapelles qui l'entouraient étaient seuls élevés. Le chœur, très-avancé sous l'évêque Nicolas de Brie (1253-63), fut achevé par Jean d'Auxois, élu en 1304.
Les transepts sont du temps des rois Philippe le Bel et Louis le Hutin, dont on voyait, avant le badigeonnage, les écussons peints aux voûtes. La nef, continuée au quatorzième siècle, fut interrompue par les guerres et reprise en 1450 pour être achevée en 1492. Le clocher, construit au centre des transepts, ayant été renversé par une tempête, ne fut relevé qu'en 1430. Les premiers fondements du grand portail et des tours furent posés, en 1506, par l'évêque Jacques Raguier. Ce fut Martin Chambige, de Beauvais, maître de maçonnerie, qui en dirigea les travaux en 1510; il fut remplacé par Jean de Soissons, qui céda sa charge à Jean Bailly en 1550. Celui-ci continua la tour, qui ne fut achevée qu'en 1648. Le clocher, qui s'élevait à 60 mètres environ au-dessus des combles de l'église, attira plusieurs fois la foudre sur le monument; en 1700, il fut incendié et il communiqua le feu aux toits de l'église.



Le portail principal est percé de trois portes a 53 mètres de largeur sur 33 mètres de hauteur, jusqu'à l'appui de la balustrade qui règne au-dessus de la rose centrale. La tour du nord a seule été achevée; elle s'élève à 64 mètres jusqu'à la plate-forme, et les deux tourelles qui la surmontent ont 10 mètres d'élévation. Cette façade, divisée en trois parties verticalement par des contre-forts, présente le développement complet de l'arc ogival qu'on désigne sous le nom de flamboyant. Toutes les surfaces lisses sont tapissées de moulures; ce n'est partout que rinceaux, que clochetons. Le bord intérieur des arcades des trois portes est festonné en dentelles de pierre; le même motif décore les voussures et descend jusqu'au niveau du sol. Les doubles trumeaux des portes sont bordés de feuillages et de figurines, et les tympans tapissés de moulures et de dais destinés à des statues qui n'existent plus, et que l'on attribuait au sculpteur Gentil; les contre-forts sont dissimulés par des niches couronnées de dais où se voyaient autrefois des statues de saints; la balustrade qui règne sur la plate-forme au-dessus des voussures des portes, et celle qui sépare le portail proprement dit de la base des tours, sont découpées à jour, et figurent des fleurs de lys ajustées à des trèfles et réunis par des petits pilastres. La rosace centrale est un chef d'oeuvre de combinaison géométrique; le pignon qui la surmonte et se rattache à la balustrade était terminé autrefois par l'écusson de France, qu'on a converti pendant la révolution en une figure des Tables de la loi.
La tour du nord, élevée, comme on l'a vu, à la fin du seizième et du dix-septième siècle, est en désaccord dans les parties supérieures avec le style du reste du portail; les architectes l'ont terminée par un couronnement corinthien; celle du sud n'a pu monter au-dessus du portail.
Le portail nord du transept, dit le petit portail, construit au treizième siècle, a été modifié dans les temps postérieurs; il est divisé horizontalement par des balustrades en trois étages: le porche, l'étage intermédiaire formé d'une colonnade ogivale formant fenêtres, et la rose de style flamboyant. Le pignon terminal est un pan de bois recouvert d'ardoises qui fait un contraste fâcheux avec la légèreté de la rose qui est en-dessous.
Le portail sud, rétabli récemment, est disposé comme le précédent; il avait déjà éprouvé de grands accidents à la fin du quatorzième siècle, et sa rose fut refaite vers 1530.
Les contre-forts qui soutiennent la poussée des voûtes, surtout le sanctuaire, font un effet pittoresque par leurs arcs-boutants à meneaux et leurs clochetons pyramidaux. La balustrade en forme de créneaux, qui règne au-dessus du grand comble, lui donne de la légèreté.
Le plan de la cathédrale forme cinq nefs, avec chapelles latérales et transepts. Les cinq nefs se réduisent à trois au sanctuaire, autour duquel rayonnent des chapelles, et qui est terminé circulairement. L'étendue du vaisseau est de 120 mètres de longueur dans son oeuvre, sur 48 mètres de largeur. Treize arcades ogivales forment le chœur et sont appuyées sur des piliers cantonnés de colonnes qui se changent en monolithes autour du sanctuaire. Les fenêtres supérieures sont divisées comme le triforium en quatre compartiments et disposées dans la forme rayonnante. De belles verrières y brillent d'un bel éclat.
Les chapelles qui entourent la cathédrale sont nombreuses et construites dans le style des parties du corps du monument qu'elles avoisinent; celles d'autour du sanctuaire, celle de la Vierge en particulier, sont admirables. Les autres, à mesure qu'on avance dans la nef, présentent les diversités du style ogival des quinzième et seizième siècles. Des vitraux nombreux et remarquables en remplissent les fenêtres, ainsi que les immenses baies de la haute nef et du sanctuaire, et les trois roses des portails. Les peintres troyens se sont signalés aux différentes périodes de l'histoire de la cathédrale par des œuvres d'un grand mérite. Cette église possède encore des pierres tombales fort curieuses des chanoines des quinzième et seizième siècles. (1)

(1) Cette notice est empruntée à la Géographie départementale classique et administrative de la France, ouvrage consciencieusement commencé par M. Badin, directeur de l'école normale de l'Yonne qu'une mort prématurée a enlevé à ses amis l'an dernier, et par notre collaborateur M. Quantin, archiviste du département de l'Yonne.

Magasin pittoresque, juin 1849.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire