Un médecin qui ressuscite les morts???

Un médecin qui ressuscite les morts???

Un jeune médecin s'était établit dans un village du Nord. Malgré tous ses efforts, il n'avait pu vaincre la défiance inné des habitants. La clientèle ne venait pas, lorsqu'une idée lumineuse germa dans son cerveau.

Un jour de fête où toute la population se trouvait réunie sur la place de l'église, il adresse à ses concitoyens un petit speech qui peut se résumer ainsi:

- Puisque vous semblez douter de mes capacités, je veux vous montrer jusqu'où va mon savoir. Mes confrères se contentent de soigner et guérir les vivants: moi, je ferai mieux: je ressusciterai les morts. Trouvez-vous dimanche au cimetière et vous verrez.

Cette promesse fit sensation. Aussi, au jour dit, toute la population se pressait-elle au cimetière.

Le médecin commence par s'adresser aux enfants d'un fermier, mort quelques mois auparavant, laissant une jolie fortune et des regrets en proportion. Il leur propose de faire revenir leur père à la vie. 

Les héritiers se consultent et... prient le praticien de n'en rien faire. Ils s'étaient habitués au grand vide qu'avait laissé le défunt; puis ils éprouveraient du chagrin à le perdre une deuxième fois.

Vint ensuite le tour d'une veuve que le trépas de son époux avait rendu folle de douleur. Celle-ci aussi repoussa la proposition. Elle devait se remarier à la fin de son deuil et, ma foi, elle aimait mieux laisser son premier mari là où il était.

Après, ce fut un neveu auquel la mort de son oncle, millionnaire, avait fait verser d'abondantes larmes.

Lui non plus ne voulut pas accepter la proposition du docteur; son brave homme d'oncle était au ciel, puis la douleur que le neveu avait éprouvée était de celles qui ne se renouvellent pas sans danger.

Bref, tous les intéressés, interrogés, ne voulurent pas, pour une cause ou pour une autre, voir revenir à la vie leurs chers défunts.

Seulement, l'intelligent médecin avait ébloui les campagnards par son audacieuse assurance, et dès lors les clients ne se firent pas attendre.

Mon dimanche, 20 septembre 1903.