mardi 14 août 2018

Les galons des rois.

Les galons des rois.


Quand les rois prennent du galon, ils en usent à l'aune, encourageant ainsi leurs sujets à rechercher toutes les distinctions, toutes les parures de la vanité.
Lors de son couronnement, Edouard VII fut salué de ces titres solennels: "Edouard, septième du nom, par la grâce de Dieu, roi de Grande-Bretagne et d'Irlande, souverain de tout l'empire britannique au-delà des mers, roi et défenseur de la Foi, empereur des Indes." 



Jadis, de l'avènement  d'Edouard III au règne de Georges III, le héraut à la cotte semée de fleurs de lys donnait à son maître du "roi de France". On dut renoncer à cette présomptueuse coutume! Quant à la qualité de "défenseur de la Foi" les souverains anglais l'ont reçue d'Henri VIII qui la tenait du pape.
Il faut convenir d'ailleurs que le Saint-Siège, pour la plus grande gloire de sa politique, accorda volontiers des titres religieux aux souverains d'Europe. Le roi de France était "le Roi très chrétien, le fils aîné de l'Eglise". Le roi d'Espagne se pique d'être "Sa Majesté très catholique". L'empereur d'Autriche a droit à ces appellations: "Majesté apostolique, roi de Bohème et roi apostolique de Hongrie". Les Successeurs de Saint-Pierre contentaient toutes les ambitions couronnées. Et l'on sait que Rome fabrique encore, bon an, mal an, quelques douzaines de comtes et de marquis.
Les princes musulmans sont friands, eux aussi, de galons. Le sultan de Turquie s'appelle "Successeurs des Califes, le Commandeur de la Foi". Les peuples le nomment le plus souvent: "L'Homme-Rouge, l'Homme-Malade, la Bête inquiète de Constantinople". Le Sultan du Maroc se dit le "Prince des vrais croyants". Et modeste, l'émir d'Afghanistan se pare du titre de "Zia-ul MitatiWadiu", ce qui veut dire en bon français: "Le Soleil de l'Union et de la Religion". Mazette!
Le shah de Perse et Ménélik se partagent, sans dispute, la qualité de "Roi des Rois", alors que le souverain du Japon n'est que "Mikado", soit "La Porte honorable".
Nicolas II est le "Petit Père" ou le "Grand Czar Blanc". Et Guillaume II, à défaut de dénominations pompeuses consacrées par la tradition, s'empare de tous les petits galons à l'usage des simples mortels: Guillaume le grand guerrier, Guillaume le grand musicien, Guillaume le grand sculpteur, Guillaume le grand prédicateur, etc.



Il fut pourtant un souverain qui lui eût enseigné l'art d'étonner le monde.
Le roi Theebair de Birmanie, déposé en 1885, possédait presque autant de titres que de sujets: Sa Majesté la plus glorieuse et la plus excellente; le lord-maire de l'Ishaddan; le Roi des Éléphants; le Maître de tous les éléphants blancs; le Maître des mines d'or, d'argent, de diamant, d'ambre; Le Grand et noble Serpent; le souverain des empires de Thunaranta et de Tampadipa; le support de la religion; le monarque fils et descendant du Soleil; l'Arbitre de la vie et de la mort; le Droit des droits; la Suprême Sagesse; le Maître des Maîtres; le Roi des Etats sans limites dans le monde entier; le Chef des porteurs d'ombrelles.
C'était trop. On délesta ce pauvre sire du fardeau de tant de charges honorifiques!

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 18 octobre 1903.

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