mardi 6 mars 2018

Le lapin au service du juge d'instruction.

Le lapin au service du juge d'instruction.


Le lapin est un animal méconnu; le genre humain n'apprécie pas à leur juste valeur les services que cet éternel martyr rend à la science. un crime a été commis; la seule charge relevée par le juge d'instruction est une éclaboussure à peine insignifiante, à peine perceptible qui a été découverte sur les vêtements de l'accusé. Ce doit être une tache de sang, mais est-il bien sûr que ce soit une tache de sang humain?
Un lapin élevé à la dignité d'officier de police judiciaire se chargera d'étudier en quelques instants ce problème. M. Robert Kennedy Duncan, professeur de chimie industrielle à l'Université du Kansas nous fait connaître les épreuves préparatoires que ces auxiliaires inattendus de la justice doivent subir pour se rendre capables de s'acquitter avec succès de leur mission.
"Dans l'établissement central où se fabriquent les dix mille remèdes de la pharmacopée américaine, dit le savant collaborateur du Harper's Magazine, on prépare sur commande le nouveau réactif imaginé par Wasserman pour la découverte du sang humain.
Un lapin de constitution robuste est soumis à des injections intrapéritonéales de huit à dix centimètres cube de sang humain. Après sept ou huit de ces injections administrées à deux ou trois jours d'intervalle, le sang primitif du lapin est en partie éliminé. Le sang de ce lapin "humanisé", ajoute M. Kennedy Duncan, a la propriété toute particulière d'être un réactif qui permet de reconnaître la présence de sang humain même à l'état de solution extrêmement diluée. Peu importe que la tache suspecte n'en contienne qu'une quantité infiniment petite, qu'elle soit desséchée depuis longtemps ou qu'elle ait été soumise à l'action du froid ou de certains agents chimiques, le précipité produit par ce réactif est toujours facile à reconnaître et nettement caractérisé."
Signalons pourtant une cause d'erreur: les curieuses expériences dont le savant collaborateur du Harper's Magazine a donné le compte rendu ne permettent pas de distinguer le sang de l'homme de celui du chimpanzé ou du gorille. Les grands singes anthropoïdes sont des cousins pauvres qui ne laissent échapper aucune occasion de rappeler les liens d'une parenté lointaine et contestée.

                                                                                                             G. Labadie-Lagrave.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée,11 août 1907.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire