mercredi 7 mars 2018

A propos d'une ancienne ordonnance.

A propos d'une ancienne ordonnance.

Il y aura bientôt un siècle, un honorable médecin bordelais, appelé auprès d'un malade, laissait cette ordonnance, curieuse à plus d'un titre, ne serait-ce que pour la manière dont il mettait l'orthographe. Il est bien probable que la façon dont il avait fait ses humanités, avait été un peu précipitée et écourtée.
Tout d"abord, un court exposé symptomatique:
"Catarrhe pulmonaire chronique accompagnée de fièvre et d'une forte irritation des bronches. Expectoration chaque matin d'une matière muqueuse, un peu rougeâtre. Beaucoup d'oppression. Monsieur a maigri d'une manière sensible depuis quelque temps."
Voici le traitement indiqué:
"1° Dans la matinée, prendre 3 petites tasses du bouillon suivant:
Prenez les cuisses de 6 grenouilles, 4 escargots dont on cassera la coquille; faire bouillir le tout dans deux verres et demi d'eau pendant vingt minutes; ajoutez une pincée de cresson et laisser infuser pendant un quart d'heure; ajoutez un peu de sucre dans chaque tasse.
2° Dans le courant de la journée, boire une décoction de gruau coupée avec du lait où l'on ajoutera du sucre.
3° Matin et soir, Monsieur prendra un demi-verre de la décoction suivante:
Prenez un peu de quinquina gris concassé, qu'on fera infuser pendant la nuit dans un verre d'eau. Tirez à clair et ajoutez sur chaque demi-verre une cuillerée à café de sirop diacode et autant de sirop de gomme.
4° Dans la journée, sussez des petits morceaux de gomme.
5° Si l'irritation des bronches prenait un caractère plus aigu on appliquera 6 sangsues devant et en bas du cou.
6° Se tenir toujours vêtu chaudement et de la laine sur la peau.
Se priver d'aliments échauffants, de ragoûts, de fromages, de café, de liqueur, de vin pur.
Le laitage, les légumes, les fécules conviennent, ainsi que les viandes blanches."

Le Journal de Médecine de Bordeaux, du 27 septembre 1908 et la France médicale, qui citent cette ordonnance, commentent surtout la préparation du bouillon de grenouille et d'escargot.
En effet, dans le Dictionnaire de Littré et Robin, la grenouille, Bana esculenta,  est indiquée comme servant à préparer des bouillons lénitifs et adoucissants.
En outre, les Drs Cabanès et Barraud, qui ont réuni le résultat de leurs recherches en médecine populaire dans leur intéressant ouvrage les Recettes de bonne femme, tout en laissant de côté la grenouille, rappellent, page 159, que la fricassée de tétard, jeune grenouille, est d'un usage courant, prise à l'intérieur, contre la fluxion de poitrine, réussissant dans les cas où les autres remèdes ont échoué. Le tétard, disent-ils, passe pour pomper le mauvais sang, et il a plus d'action mort que vivant.
La grenouille a disparu des formulaires; mais elle est heureusement restée dans les livres de cuisine.
L'escargot est en train de subir le même sort, heureusement pour les gourmets. Cependant on le trouve dans un excellent petit livre, le Formulaire récent de Gilbert et Yvon, 1904. On lit à la page 137, que l'Helix pomatia, mollusque gastéropode, est préconisé contre les affections de poitrine et les dartres sous forme de bouillon, gelée, pastille, pâte, saccharose ou sirop. Plusieurs industriels ont fait fortune en vendant de la pâte d'escargots à une époque où les pastilles contre la toux ne couvraient pas de leurs réclames les murs des stations de Métro*.
L'escargot est d'ailleurs très nourrissant, plus que l'huître et que la moule, contenant 16,25 gr. p. 100 de matières azotées.
En tout cas, la vieille ordonnance est intéressante et je suis convaincu que plus d'une de nos lectrices essaiera le bouillon formulé, qui ne peut être qu'avantageux.

Les Annales de la Santé, 15 mai 1912.

* Nota de Célestin Mira: quelques médecins du XVIIIe siècle


Une opération.

Une saignée.


Un chirurgien.


Un dentiste.


* Les bonnes recettes:


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