mardi 4 octobre 2016

Un couvent de Paris au temps jadis.

Un couvent de Paris au temps jadis.


A l'angle des rues de Grenelle et de Belle-Chasse, une chapelle à coupole sert de temple protestant, une caserne occupe des bâtiments claustraux; ce sont les restes de l'abbaye de Panthémont où furent élevées, au dix-huitième siècle, toutes les jeunes filles de qualité.
Louise d'Esparbès de Lussan y entra, en 1776, à la veille de sa première communion. Elle y connut un peu plus tard la duchesse Jules de Polignac qui vit dans cette enfant jolie, aimable et douce, petite-fille du riche financier Rougeot, une épouse à souhait pour son frère, le comte de Polastron.
En 1780, date du mariage, Louise n'avait que quinze ans, son mari n'en avait pas plus de seize. La jeune épouse fut replacée au couvent. 
Nul séjour n'était moins austère. Les pensionnaires avaient chacune leur femme de chambre et donnaient à leur toilette tout le temps qu'elles voulaient; la musique, le dessin, la danse, tenaient dans leurs études une place importante; elles recevaient beaucoup de visites; les soirées se prolongeaient en d'aimables causeries.
Le jeune époux, très affectueux, venait souvent voir sa petite femme; on veillait seulement à ce qu'il ne l'enlevât point, comme le duc de Bourbon avait enlevé la sienne quelques années auparavant. Louise d'Esparbès allait constamment à Versailles; on la voyait aux bals, aux concerts, aux spectacles, à toutes les réunions de "la galerie de bois" où la duchesse de Polignac recevaient tous les familiers de la reine. Marie-Antoinette s'était prise pour la jeune comtesse d'une vive amitié que partageait déjà le comte d'Artois.
C'est ainsi que le couvent, dont le nom seul évoque pour beaucoup l'idée de claustration et de solitude austère, était un lieu de plaisance. On y jouait, on y dansait, on y donnait la comédie comme dans le plus mondain des salons. Et l'on y préparait les fiancées à tenir magistralement leur place de "grandes dames".
Tous les couvents n'étaient d'ailleurs pas ainsi: la sévérité de certains cloîtres fait frémir.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 19 mars 1908.

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