vendredi 18 décembre 2015

Marques de boulangers et de pâtissiers arabes.

Marques de boulangers et de pâtissiers arabes.


Un archéologue en renom enseignait dernièrement dans ses doctes leçons qu'au temps des Assyro-Chaldéens on scellait d'un cachet spécial à peu près toute chose (1). Le boulanger ne faisait sûrement pas exception à cet usage: il est naturel qu'en tout pays et en tout temps le fabricant d'un produit industriel quelconque ait tenu à attester l'excellence de ce produit en le frappant d'une marque. On a des marques de boulangerie à Paris, à Alger et à Tunis, comme il y en avait à Babylone.








La sévérité dont on usait autrefois à Fez ou à Tunis à l'égard des industriels sans conscience qui exposaient au bazar des produits défectueux, peut avoir été pour beaucoup dans l'adoption des marques de fabrique, qui a persisté jusqu'à nous.
Les marques arabes s'appliquent sur les gâteaux de pâte ferme. On les trouve, par exemple, sur les alcone, qui ont encore beaucoup de réputation dans certaines parties de la Péninsule, et dont la pâte ne diffère pas beaucoup de celle de nos brioches, si ce n'est qu'elle est sucrée. Ces sortes de pâtisseries sont plates et arrondies, à peu près comme nos biscuits de mer; elles sont fort appréciées des enfants arabes.








Certaines pâtisserie arabes, si elles n'étaient pas toujours parfumées à l'excès et enduites d'une couche par trop épaisse de miel, seraient plus appréciées par les palais européens.
Qui ne connaît à Alger et à Tunis le fameux gâteau national que les Arabes désignent sous le nom de mastouffe? C'est un composé de couscoussou cuit à la vapeur, assaisonné de crème et de cannelle pilée, le tout recouvert d'une forte couche de sucre en poudre ornée elle-même de fruits confis et parfois de fleurs. En mainte occasion on adresse à ses amis un mastouffe enfermé d'ordinaire dans un vase élégant et délicatement orné d'étoffes brodées qui pendent des deux côtés.
Le flers est aussi un beignet très-estimé des Arabes; les Européens s'en soucient médiocrement.
Ramusio, et après lui Jean Temporal nous ont donné des renseignements fort détaillés sur différentes friandises arabes. Bien informés de tout ce qui touche à l'art culinaire des Etats barbaresques, il nous ont fait connaître au dix-septième siècle, des préparations qui n'ont guère variées avec le temps. Certains gâteaux africains sont encore aujourd'hui ce qu'ils étaient lorsque les Romains faisaient cultiver à leur profit ces régions fertiles.

(1) Voy. l'article du Journal des savants de septembre 1970. Quelques auteurs affirment qu'il faut chercher en Orient et dans une partie de l'Afrique l'origine de ces marques spéciales, dénotant un sentiment plus ou moins développé de goût ou d'amour-propre, et dont on s'est servi pour caractériser une fabrication quelconque et la recommander aux consommateurs. Dans un ordre plus élevé, pour constater l'authenticité ou la valeur de certains documents, on se sert de la gravure en creux ou en relief qui a donné lieu, personne ne l'ignore, à une science que l'on a nommée la glyptique, et dont les origines remontent à la plus haute antiquité. A cet égard, l'Orient moderne n'a pas dégénéré de ses vieilles habitudes. En Afrique, l'auteur de ces lignes a vu des noirs qui portaient sur leur dos, sur leur poitrine, et parfois sur des parties moins nobles de leur corps, des bourrelets de chair en saillie pure, gravure d'ornement fort étrange, qu'on pourrait appeler la glyptique humaine, et qui peut servir à faire connaître l'identité de certaines peuplades.

Le Magasin pittoresque, août 1875.

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