mardi 1 septembre 2015

Rira bien qui le dernier rira.

Rira bien qui le dernier rira.

L'entrée des Sarrasins causa des étonnements; la course des fantômes a fait des incrédules.
Les plus braves des gens du guet se sont risqués et sont sortis du côté où les appelait la grande clameur emplissant les ruelles et les places.
A propos qui gagnera la gageure? Quelle marotte s'esjouira aux dépens de l'autre? Parmi tant de bons tours, comment décidera maître François?
Voilà ce que se disaient les fous courant à grandes enjambées dans la rue Tulibade. Derrière eux couraient les gens du guet. Les fols s'en rient et d'avance se pourlèchent les lèvres du bon festin auquel enfin il est temps d'aller s'asseoir. Mais la moitié du guet a coupé court par la ruelle du Bout-du-Monde et débouche devant les trois sacripans, qui sans cesser de rire à gorge déployée, comme des chats grimpent aux murs et se cramponnent aux enseignes ou gouttières, et de là narguent le guet.




M'est avis que faut être fol naturel et vrai lunatique pour rire en telle posture.
Eh bien, mes amis, qui soupera aux frais de l'autre?
Angoulevent ou Tuybelim?
Marotte rouge, ni marotte jaune n'aura cet avantage. Vous êtes traqués, entourés, cernés, mes bons amis.
François a beau verser un pot d'eau sur le guet, vous êtes pris. Vous avez beau rire! Entre deux gens d'armes, il vous faudra marcher à jeun, crossés et malmenés jusqu'au château, et bientôt sans doute le roi René vous saura récompenser selon vos mérites.
Il n'est pas temps de rire et ne s'agit point de dîner! Cessez, de pardieu, vos rires impudents!
Rira bien qui le dernier rira.

                                                                                                           Maggeunousse.

Grand Almanach Français illustré, 1891.

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