D'où vient le surnom de Cordon bleu.

D'où vient le surnom de Cordon bleu donné aux fines cuisinières?

On a voulu donner mainte origine spéciale à cette désignation, que l'on hésitait à rapporter au cordon bleu par excellence, c'est à dire au ruban de l'ordre royal du Saint-Esprit. Mais il est aujourd'hui formellement avéré qu'il ne faut pas chercher ailleurs que dans l'histoire de cet ordre, dont les très rares titulaires portaient les insignes suspendues à un large ruban ou cordon bleu, le titre honorable décerné aux grandes artistes culinaires.

Au temps où l'obtention du fameux cordon était le point de mire des plus hautes ambitions, sans qu'il fût possible de faire beaucoup d'élus, puisque, y compris le roi ou les princes du sang, titulaires nés, le nombre des membres de l'ordre était borné à cent, il va de soi qu'un cordon bleu était, à tort ou à raison, considéré comme un personnage du plus haut mérite.

De là vint que du haut en bas de l'échelle sociale la qualité de cordon bleu fut décernée par analogie à ceux ou à celles qui se mettaient hors de pair dans leur profession. Ce fut, paraît-il, dans les congrégations religieuses que se fit la première assimilation. " Le Père untel, disait-on par exemple, est le cordon bleu de l'ordre", comme nous disons aujourd'hui: "M... untel est un des princes de la finance, de l'art, de la littérature, etc."

Par un singulier hasard, pendant que l'usage de cette locution s'éloignait pour les autres états, il restait d'une application, de plus en plus fréquente pour la gent culinaire, qui n'aurait, croyons-nous,  aucune raison de le voir tomber en désuétude.

Grand Almanach Français illustré, 1891.