jeudi 16 avril 2015

Comment on organise les petites soirées d'amis.

Comment on organise les petites soirées d'amis.

Nous ne voulons parler ici que des petites soirées entre intimes, de ces bonnes heures de franche gaieté où chacun apporte son bilan de joyeuse humeur, d'entrain ou d'esprit. Ces réunions n'ont rien des soirées mondaines dont le luxe, inaccessible à la plupart d'entre nous, est le principal attrait. Il est facile de "donner une soirée" dans un petit appartement et avec un bien mince budget quand le programme tient tout à fait dans ces mots: s'amuser à peu de frais.

L'arrangement des pièces.

La première difficulté est l'exiguïté de l'appartement; trois pièces, une antichambre- couloir, un cabinet de débarras. Tout d'abord, on rentrera dans une armoire les menus bibelots fragiles et on rangera dans le cabinet noir les petits meubles qui encombreraient sans utilité: tables-étagères, tables à ouvrage, etc. En résumé, on ne laissera que les gros meubles, les tables pratiques et solides et, enfin, tous les sièges. On obtiendra ainsi une superficie qu'on ne pouvait soupçonner aux pièces plutôt petites. Quelques couples pourront y faire un tour de valse, on pourra y jouer des charades en action, s'y grouper pour écouter les artistes amateurs, les monologues amusants: on pourra, en tous cas, y circuler à l'aise.
Nos lectrices choisiront dans les dispositions que nous allons leur indiquer celles qui conviennent le mieux à leurs appartements.

Premier arrangement.
Deux chambres à coucher, une salle à manger-salon, une étroite antichambre, une cuisine passable. Dans la plus petite chambre, on mettra une table recouverte d'un tapis, des cartes, des jeux, quelques chaises, les fauteuils pour les bons vieux parents qui viendront là s'isoler un peu de la bruyante et jeune gaieté. Dans la salle à manger, le buffet sera, si on le peut, reculé dans un coin, la table enlevée (mise comme table de jeu, par exemple) ou poussée contre une des parois de la pièce (il faudra alors démonter la suspension), les sièges rangés le long du mur. Si on a un piano, il sera dans cette pièce qui communique, supposons-le, avec la grande chambre. Pour celle-ci, débarrassée également des meubles volants, nous utiliserons le dessus de lit comme vestiaire pour les dames. On laissera retomber les rideaux du lit, habituellement drapés qui envelopperont ainsi les coiffures et vêtements posés sur le lit. Ou bien ce dernier sera lui-même caché par un haut paravent.

Deuxième arrangement.
Une très grande chambre, un salon moyen, une petite salle à manger, une antichambre assez large, une minuscule cuisine. On fera de la salle à manger la salle des joueurs, le piano étant au salon, c'est dans la grande chambre qu'on aura plus de place pour la sauterie improvisée. Le vestiaire des dames sera placé au fond de l'antichambre ou dans un coin de la salle à manger, recouvert au besoin par un rideau provisoirement installé.

La cuisine.
Qu'elle soit petite ou grande, qu'on l'utilise pour le buffet dont nous allons parler, ou simplement pour la préparation des rafraîchissements, la cuisine sera minutieusement nettoyée, un rideau de cretonne tombant flottant cachera très bien la pierre d'évier, le vilain potager, etc. tout en donnant un air gai et propret à la pièce. Le fourneau à gaz ou à pétrole serait, bien entendu, laissé libre pour chauffer les boissons de la soirée.

Le buffet.

Deux combinaisons pour les rafraîchissements à offrir. On peut soit préparer un thé dans l'une des pièces où à l'heure voulue les invités se réunissent, soit avoir une sorte de buffet servi où chacun vient, pendant la soirée choisir le rafraîchissement préféré. La dépense est presque la même.
Dans le premier cas, on a soin de préparer tout de façon qu'en quelques minutes la maîtresse de maison, aidée des jeunes filles et des grandes fillettes amies, puisse arranger joliment sur une nappe de fantaisie les assiettes de gâteaux et le couvert du thé, tour en préparant le punch, le chocolat, le thé, le grog chaud, etc.
Dans le second cas, on organisera sur une table, soit dans la cuisine si elle est assez grande, soit dans l'angle d'une pièce, un buffet servi. Des assiettes de fours, des quartiers d'oranges, du chocolat froid, de l'orangeade, des cerises à l'eau de vie, de la bière. Les boissons chaudes seront préparées vers le milieu de la soirée et passées sur un plateau.

Ce que peuvent coûter le buffet ou le thé d'une petite soirée.








L'éclairage.

Un éclairage insuffisant rend lugubre une soirée. On réservera donc un peu du petit budget pour renforcer l'éclairage ordinaire soit en allumant plusieurs lampes en plus, soit en utilisant tous les flambeaux, candélabres, appliques, qu'on garnira de bougies.
Si on habite une de ces maisons neuves dans lesquelles l'électricité est dans les plus petits appartements même, on pourra, à très peu de frais, faire brancher des lampes supplémentaires;
Quelques feuillages piqués de fleurs de saison ou les plantes vertes, palmier, aralia, etc. qu'on peut avoir, seront disposés sur le buffet de la salle à manger, dans les angles des pièces, et donneront vite au logis un air de fête.
L'essentiel est de prévoir avec soin tout ce qui est nécessaire pour la petite réception et ceci avec d'autant plus d'attention qu'on a de difficultés à vaincre. Rien n'est plus désagréable pour les convives, rien ne glace plus l'entrain et la gaieté que l'impression qu'on impose une gène, tout un travail, etc. Si cela est, il ne faut pas que nos hôtes s'en aperçoivent et, nous le répétons, le seul moyen d'y parvenir est de prévoir, de préparer les plus petits détails. 
Si on n'a pas de piano et qu'on veuille en louer un, il faut compter sur une dépense d'au moins 20 francs.
Il y aurait avantage, en ce cas, et si on compte recevoir plusieurs fois ses amis, à faire un prix de location pour toute la saison.

Règles de politesse.

C'est surtout dans les soirées que ceux qui reçoivent doivent montrer qu'ils connaissent les règles du savoir-vivre et de la politesse. Les invitations doivent être adressées au moins huit jours à l'avance; et on doit y répondre immédiatement. Voici la formule ordinaire d'invitation: "M. et Mme X... prient M... de leur faire l'honneur de venir passer la soirée du ... chez eux. On dansera." Le maître de la maison va au devant des dames qui entrent dans le salon et leur offre le bras pour les conduire à un siège. En arrivant dans le salon, les messieurs vont saluer la maîtresse de maison.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 1er janvier 1905.

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