mardi 25 novembre 2014

Les Guanches.

Les Guanches.

On a présumé que les premiers habitants des îles Canaries étaient une colonie d’Égyptiens dont ils avaient conservé les mœurs et la religion; mais ils tombèrent insensiblement dans la barbarie.
Il n'avaient cependant rien de cette cruauté qu'on reproche aux barbares. Ils regardaient l'effusion du sang avec horreur, et la haine ne leur faisait point imaginer de vengeance plus rigoureuse contre leurs ennemis, que de les employer à garder les chèvres et à les nettoyer: exercice qui passait chez eux pour le plus méprisable.
Les Guanches, c'est le nom qu'on donnait à ce peuple; étaient grands, robustes, et si agiles, qu'ils descendaient du haut des montagnes en sautant de rochers en rochers. Ils se servaient pour cela d'une pique longue de neuf à dix pieds, sur laquelle ils s'appuyaient pour s'élancer d'un endroit à l'autre. Leur habit était de peau de chèvre; leur nourriture, une pâte composée d'orge pilée, d'eau et de miel. Ils se servaient de pierres dans les combats et les lançaient avec autant de force que d'adresse.
Leurs maisons étaient des cavernes taillées dans le roc ou formées par la nature. Ils avaient des rois et leur étaient très-soumis. Les jeunes gens, lorsqu'ils se mariaient, renouvelaient le serment de leur être fidèle et de leur obéir.
Ces peuples reconnaissaient un Etre suprême, auquel ils offraient des sacrifices. Ils avaient quelque idée de la punition future des crimes, et regardaient le volcan du pic de Ténériffe comme l'enfer des méchants. Ils avaient retenu de leurs ancêtres le secret d'embaumer les morts, de manière qu'il ne se corrompaient jamais; ils les plaçaient dans de grandes caves creusées sous des rochers.
On voit encore aujourd'hui de ces cavernes sépulcrales, où les corps sont presque entiers quoiqu'ils y soient enfermés depuis plusieurs siècles. Parmi ces espèces de momies, les unes sont debout, les autres couchées sur des lits de bois si dur, qu'il n'y a pas de fer qui puisse le percer. Ces cadavres sont aussi légers que la paille; les nerfs, les tendons et même les veines et les artères , paraissent comme autant de petites cordes.
Si l'on s'en rapporte à ce que disent les descendants de ces anciens Guanches, il y avait parmi leurs ancêtres une tribu particulière qui possédait seule l'art d'embaumer les corps, et le conservait comme un mystère sacré qui ne devait jamais être communiqué au vulgaire.
Mais, après la conquête de ces îles, la plupart des membres de cette tribu furent exterminés par les vainqueurs, et leur secret périt avec eux.
Les îles Canaries furent longtemps inconnues aux peuples de l'Europe; les Castillans n'en firent la découverte que vers la fin du quatorzième siècle et ne s'y établirent même pas. Vingt ans après, deux gentilshommes français, nommés Bethencourt, obtinrent du roi d'Espagne la permission de les conquérir. Ils en soumirent quatre à leur obéissance; et, dans la suite, ils les cédèrent au roi de Portugal, qui leur donna en échange quelques terres dans l'île de Madère. Enfin, toutes les Canaries furent annexées à la couronne d'Espagne, par un traité fait entre les Portugais et les Castillans.
Dans ces commencements, les indigènes ne se montrèrent pas fort dociles aux vérités du christianisme; les missionnaires les y amenèrent par degrés. Leurs habitations étaient de simples villages, sans fortifications et sans défenses dans les plaines, mais si bien retranchés dans les montagnes, qu'il fallait un siège pour les forcer.
Aujourd'hui le nom des Guanches n'est plus qu'un souvenir historique: leur race a disparu.

La semaine des enfants, 6 juillet 1864.

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