vendredi 25 octobre 2013

Le mariage Arabe.

Le mariage Arabe en Algérie.


En Algérie, chez les Arabes comme chez les Kabyles, il ne se conclut aucun mariage sans qu'une dot soit apportée, non pas par la fiancée à celui qui l'épouse, mais par ce dernier au père de la jeune fille. Le mari achète positivement sa femme. Aussi le grand nombre des filles dans une famille est-il considéré comme une richesse. Cette dot consiste en une somme d'argent ( assez ordinairement cent douros, environ 540 francs), à laquelle s'ajoute quelquefois, selon la fortune du futur époux, le don d'un ou plusieurs nègres ou négresses. Le père exige, en outre, pour sa fille des présents dont il fixe la nature et la valeur: colliers, bracelets de bras et de pieds, étoffes du Soudan, divers vêtements, avec une quantité déterminée de blé, d'orge, de beurre, d'épices et de parfums.
Quand les deux familles sont tombées d'accord et que le cadi a écrit leurs conventions, les présents sont apportés par un certain nombre de parentes du fiancé. La jeune fille, sa mère, ses sœurs, ses amies, accueillent leur arrivée par ces cris joyeux et retentissants, you, you, you, que les femmes font entendre dans les fêtes, et qu'elles produisent en se frappant précipitamment la bouche avec la main de façon à entrecouper la voix. Puis, on examine les cadeaux étalés à terre sur des tapis, et quand l'un deux excite particulièrement l'admiration de l'assemblée, les cris éclatent de nouveau. Le soir, un double souper réunit les femmes dans une pièce, les hommes dans une autre, tandis que des musiciens, assis à la porte de la maison et entourés par la foule, jouent de la flûte et du tambourin, et chantent des chansons joyeuses. Après le repas, les femmes sortent et se mettent à danser; les hommes arrivent à leur tour, se précipitent au milieu des danseuses, et, en signe de réjouissance, augmente la confusion et le tapage en tirant force coup de fusil.


Le lendemain a lieu la principale cérémonie du mariage. Le jeune homme, vêtu de ses plus beaux habits, paré de ses armes les plus riches, escorté de ses amis, se rend à la maison de son beau-père pour enlever sa fiancée, car une jeune fille ne doit pas quitter ses parents sans avoir l'air de céder à la force. Une lutte simulée s'engage entre les arrivants et ceux qui jouent le rôle de la famille attaquée; les deux troupe se mêlent, on se bat corps à corps, on pousse des cris, les coups de fusil retentissent; enfin la victoire reste aux assaillants, qui se rallient et se groupent sur le seuil de la porte. Alors, la jeune fille sort, montée sur un cheval ou sur un mulet richement caparaçonné, conduit par deux serviteurs nègres. Ses amies l'accompagnent.
En ce moment, quelques paroles solennelles sont prononcées par le marié et par la mère de la fiancée.
"Ô maîtresse de la maison, dit le premier, que Dieu me bénisse avec toi!"
La mère s'avance aussitôt et s'adresse à sa fille en ces termes.
" Vous allez quitter ceux dont vous êtes sortie; vous allez vous éloigner du nid qui vous a si longtemps abritée; d'où vous vous êtes élancée pour apprendre à marcher; cela pour vous rendre chez un homme que vous ne connaissez pas, à la société duquel vous n'êtes pas habituée.
"Je vous conseille d'être pour lui une servante, si vous voulez qu'il soit pour vous un serviteur.
" Contentez-vous de peu. Veillez constamment sur ce que ses yeux pourraient voir, et que ses yeux ne voient jamais d'actions mauvaises.
" Veillez à sa nourriture, veillez à son sommeil; la faim cause l'emportement, l'insomnie inspire la mauvaise humeur
"Ayez soin de ses biens; traitez avec bonté ses parents et ses esclaves. Soyez muette sur ses secrets.
"Lorsqu'il sera joyeux, ne vous montrez pas chagrine.
"Lorsqu'il sera chagrin, ne vous montrez pas joyeuse, Dieu vous bénira!
" Dieu vous bénisse! Dieu vous bénisse!" s'écrie la foule assemblées, vieillards, femmes, enfants, en agitant en l'air des mouchoirs, au milieu des détonations de la poudre. Puis tout le cortège se met tumultueusement en marche vers la demeure du marié; les époux y entrent seuls.
La foule, restée dans la rue, s'assied sur le sol; elle attend le festin qui va lui être servi. Bientôt, on voit apparaître des serviteurs chargés des différents mets, le kouscoussou, des moutons entiers rôtis, des dattes, du lait frais et du lait aigre, qu'ils déposent à terre, sur des nattes de palmier, devant les convives. Quelquefois, plusieurs centaines de personnes prennent part à ce banquet en plein air. Quand il est terminé, tous les assistants sont admis dans la maison; ils s'y précipitent pour voir et complimenter la mariée. Celle-ci est assise sur un tapis, la figure découverte, parée de tous ses bijoux; ses cheveux, qui en tout autre circonstances doivent rester cachés, flottent sur ses épaules.
Ces réjouissances, ces réceptions, durent jusqu'à sept jours. M. le général Daumas, à qui nous avons emprunté ces détails, fait observer que tous les mariages ne se célèbrent pas d'une manière aussi brillante, mais que le même cérémonial, consacré par l'usage, s'observe dans les plus modestes.


Magasin Pittoresque, 1879.

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